De la Confiscation sous Vichy aux Procédures Collectives Modernes
Une fonction punitive persistante
Les procédures collectives en France ont évolué du début du siècle à nos jours, reflétant des changements législatifs significatifs visant, en théorie, à protéger les entreprises en difficulté. Cependant, malgré ces réformes, sur le terrain, le constat est sans appel : certaines pratiques punitives subsistent. Pour comprendre cette dynamique, il est intéressant de comparer ces évolutions avec les pratiques de confiscation des biens juifs sous le régime de Vichy. On peut ainsi se rendre compte que ce qui était pratiqué à cette époque, la privation des droits patrimoniaux et extrapatrimoniaux du débiteur, est toujours terriblement d'actualité, en violation des droits fondamentaux.
Définition des Droits Patrimoniaux et Extrapatrimoniaux
Les droits patrimoniaux et extrapatrimoniaux sont deux catégories de droits subjectifs qui se distinguent principalement par leur valeur pécuniaire et leur relation avec le patrimoine d'une personne.
Droits Patrimoniaux
Les droits patrimoniaux sont des droits qui ont une valeur économique et sont intégrés dans le patrimoine d'une personne. Ils comprennent notamment :
- Les droits réels : Comme le droit de propriété, qui donne à son titulaire un pouvoir direct sur une chose (bien meuble ou immeuble).
- Les droits personnels : Qui impliquent une relation entre un créancier et un débiteur, par exemple, le droit de créance.
Les caractéristiques des droits patrimoniaux sont les suivantes :
- Prescriptibles : Ils peuvent être acquis ou perdus par la prescription.
- Transmissibles : Ils peuvent être transmis aux héritiers ou cédés à d'autres personnes.
- Saisissables : Ils peuvent être saisis par les créanciers pour le paiement des dettes.
- Cessibles : Ils peuvent être vendus ou échangés (JurisLogic) (JurisLogic).
Droits Extrapatrimoniaux
Les droits extrapatrimoniaux, en revanche, n'ont pas de valeur économique et ne font pas partie du patrimoine. Ils sont strictement attachés à la personne et concernent principalement :
- Les droits de la personnalité : Comme le droit au respect de la vie privée, le droit à l'intégrité physique, et le droit à l'image.
- Les droits familiaux : Par exemple, l'autorité parentale.
- Les droits civiques et politiques : Tels que le droit de vote et le droit à un procès équitable.
- Les libertés fondamentales : Incluant la liberté d'expression, de croyance, et de réunion.
Les caractéristiques des droits extrapatrimoniaux sont :
- Imprescriptibles : Ils ne peuvent être acquis ou perdus avec le temps.
- Intransmissibles : Ils ne peuvent pas être transmis à d'autres personnes.
- Insaisissables : Ils ne peuvent pas être saisis par les créanciers.
- Incessibles : Ils ne peuvent pas être vendus ou échangés (JurisLogic) (JurisLogic).
Contexte Historique et Mesures Antisémites de Vichy
Sous le régime de Vichy, une politique systématique d'« aryanisation » a été instaurée pour exclure les Juifs de l'économie française et confisquer leurs biens. Cette politique, formalisée par la loi du 22 juillet 1941, autorisait l'État à prendre possession des biens juifs et à les vendre. La loi a été publiée au Journal officiel le 26 août 1941.
Contexte et Mesures Antisémites
Le Commissariat général aux questions juives était responsable de la mise en œuvre de cette politique. Il nommait des administrateurs provisoires pour gérer les biens confisqués. Tous les secteurs de la population juive et de l'économie étaient concernés, y compris les marchands d'art et les collectionneurs.
Spoliation des Biens Juifs
La spoliation des biens juifs se faisait par la vente ou la liquidation de ceux-ci. Le produit des ventes était déposé à la Caisse des dépôts et consignations, privant ainsi les propriétaires juifs de leurs biens. Cette confiscation massive a eu des conséquences dévastatrices sur la communauté juive en France.
Pour plus de détails, vous pouvez consulter cette source.
Évolution des Procédures Collectives depuis 1941
1955 - Règlement Judiciaire :
Introduction du règlement judiciaire permettant aux entreprises de continuer leurs activités sous surveillance judiciaire tout en négociant un plan de redressement.
1984 - Loi Badinter :
Création de la procédure de redressement judiciaire, visant à permettre la continuation des activités et la sauvegarde des emplois. Renforcement du rôle de l'administrateur judiciaire pour superviser les efforts de redressement.
2005 - Loi de Sauvegarde des Entreprises :
Introduction de la procédure de sauvegarde pour permettre aux entreprises d'anticiper et de prévenir les difficultés financières avant la cessation de paiements. Accent sur la prévention et la négociation avec les créanciers.
2021 - Ordonnance de Restructuration :
Transposition de la directive (UE) 2019/1023, introduisant des classes de créanciers et le mécanisme de "cross-class cram-down" pour faciliter l'adoption de plans de restructuration réalistes économiquement.
Analogies entre 1941 et 2024
Motivation et Contexte
Sous le régime de Vichy, la motivation derrière l'aryanisation des biens juifs était fondamentalement raciste et antisémite, visant à exclure les Juifs de l'économie et à les dépouiller de leurs biens. En 2024, les procédures collectives visent à rembourser les créanciers lorsque des entrepreneurs rencontrent des difficultés financières. Bien que les motivations diffèrent – l'une étant fondée sur des préjugés raciaux et l'autre sur des principes économiques – les effets et conséquences sur les individus touchés présentent des similarités marquantes.
Effets et Conséquences Comparés
Perte de Patrimoine :
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1941 : Les Juifs ont été dépouillés de leurs biens par l'État, sans compensation équitable. Les biens confisqués comprenaient des entreprises, des propriétés immobilières, et des œuvres d'art (Ministère de la Culture) (Holocaust Encyclopedia).
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2024 : Les entrepreneurs en difficulté voient leurs biens gérés par des administrateurs et mandataires judiciaires. Ces biens sont vendus pour rembourser les créanciers. Quand les actifs de l'entreprise ne suffisent pas ou lorsque des fautes de gestion sont commises, les entrepreneurs sont privés de leur patrimoine personnel.
Ce qui aggrave la situation, c'est que pour identifier et prouver ces fautes, les quasi 2 000 pages du Code des Procédures Collectives favorisent une spoliation quasi systématique des entrepreneurs, qui doivent souvent régler leurs avocats avec leurs deniers personnels, s'ils en disposent (Droit-Finances) (Memoire Online).
Recours Limité et Défense Juridique :
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1941 : Les propriétaires juifs avaient peu de recours légaux pour contester la spoliation de leurs biens. La plupart des mesures étaient imposées sans possibilité de défense adéquate (Holocaust Encyclopedia).
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2024 : Les entrepreneurs peuvent se défendre juridiquement, mais cela nécessite des moyens financiers pour engager un avocat spécialisé. En raison de la complexité des procédures collectives, seuls environ 5% des avocats sont suffisamment formés pour offrir une défense efficace, principalement grâce à l’IFPPC (Institut Français des Praticiens des Procédures Collectives).
Or la maîtrise de cette branche du droit est incontournable pour naviguer à travers les sanctions et défendre efficacement les débiteurs (LE MAG JURIDIQUE) (Memoire Online).
Conflit d'Intérêt
Un aspect préoccupant des procédures collectives modernes est le potentiel conflit d'intérêt parmi les avocats spécialisés dans ce domaine.
Bon nombre de ces avocats se forment au sein de l'IFPPC. Ils sont souvent en lien étroit avec les administrateurs judiciaires et les liquidateurs, dont l'intérêt est de rechercher systématiquement les fautes de gestion pour justifier l'extension de la faillite aux biens personnels des dirigeants.
Cela peut créer une situation où les mêmes professionnels chargés de former les avocats sont ceux qui bénéficient de la découverte de fautes de gestion.
En conséquence, il peut y avoir une tendance à favoriser la recherche de fautes, même dans des cas où les dirigeants n'ont commis que des négligences mineures (LE MAG JURIDIQUE) (Memoire Online).
Cette dynamique renforce la nécessité pour les entrepreneurs de disposer de ressources personnelles suffisantes pour se défendre efficacement, exacerbant ainsi les inégalités et augmentant le risque de spoliation systématique sous couvert de procédures légales.
Mais qui est l'IFPPC ?
L'institut se présente ainsi :
Une référence historique pour les professionnels des entreprises en difficulté.
Créé en 1985, l’Institut Français des Praticiens des Procédures Collectives (IFPPC) est une association loi 1901 qui a la particularité d’être une structure interprofessionnelle. Il rassemble l’ensemble des professionnels de la prévention et du traitement des entreprises en difficulté :
- administrateur judiciaire,
- mandataire judiciaire,
- avocat,
- expert-comptable,
- commissaire aux comptes,
- assureur,
- banquier,
- directeur juridique d’entreprise,
- consultant des cabinets de restructuring,
- professeur de droit,
- informaticien,…
L’Institut compte près de 700 adhérents répartis en 11 Compagnies régionales sur toute la France.
Ces professionnels apportent une importante plus-value dans l’économie nationale à travers leur accompagnement des entreprises et entrepreneurs en difficulté.
(En savoir plus https://www.ifppc.fr/ifppc/qui-sommes-nous)
Un gênant Bruno Sapin à l'une de ses présidences...
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